
Environment
Inside the fight to protect the Arctic’s “Water Heart”
How the Sahtuto’ine Dene of Délı̨nę created the Tsá Tué Biosphere Reserve, the world’s first such UNESCO site managed by an Indigenous community
- 1663 words
- 7 minutes
This article is over 5 years old and may contain outdated information.
Comment une petite communauté autochtone, vivant de la mer, a-t-elle réussi à obtenir le contrôle des terres d’un archipel isolé sur la côte de la Colombie-Britannique où elle réside depuis des millénaires? Un nouveau livre de Mark Dowie tente de répondre à cette question. Dans « La leçon de Haida Gwaii : Un guide stratégique pour la souveraineté autochtone » (The Haida Gwaii Lesson: A Strategic Playbook for Indigenous Sovereignty), le journaliste primé étudie les récits anthropologiques du peuple haïda, analyse la campagne que ce peuple mène depuis cinq ans pour obtenir le titre d’autochtone, et nous parle de la beauté et de l’importance uniques de ces terres.
CES ÎLES exercent un charme indéniable, chacune d’entre elles étant un monde à part. Lointaines et invitantes, elles nous incitent à y accoster et à y séjourner un instant, à découvrir leur unicité et à contempler la vie au fil de l’eau. Et quand vous en retrouvez une centaine, regroupées en un archipel dense, c’est irrésistible. Ces îles sauvages et luxuriantes, avec leurs 6 437 kilomètres (4 000 milles) de littoral, interrompu par des rivières émanant de huit cents bassins versants, rivalisent d’attrait avec les plus belles îles du monde, surtout les plus petits îlots isolés qui ont reçu des noms tels que 2. La traduction populaire de Haida Gwaii est « Îles du peuple ». Ce nom est dérivé de « Xaaydlaa Gwaayaay », qui se traduit littéralement du Xaayda Kil, la langue haïda, par « Sorti de l’obscurité », « Tuf », « Pierre plate », « Monument » et (mon préféré) « Pierre esseulée ».
Lorsque de ma première approche de la rive orientale des îles au printemps 2015, je me les suis imaginées au moment où elles se sont offertes au regard des humains pour la première fois. Les ancêtres des Haïdas sont-ils tombés sous le charme tout comme moi? Ont-ils été aussi attirés que moi par les étendues de mousse intertidales, leurs forêts impénétrables s’élevant de façon spectaculaire jusqu’aux lointaines montagnes enneigées San Cristobal? L’endroit m’a semblé si accueillant, si pur et si paisible, jusqu’à ce que je vois les îles de l’autre côté, quelques jours plus tard.
La majeure partie du littoral occidental de Haida Gwaii est à la limite du plateau continental, un escarpement tectonique abrupt qui s’élève depuis 2 743 mètres (9 000 pieds) sous le niveau de la mer jusqu’au sommet des montagnes San Cristobal, à 914 mètres (3 000 pieds) d’altitude. La ligne de côte, rocheuse et dangereuse, est battue jour après jour par des vagues pouvant atteindre 27 mètres (90 pieds) de haut, poussées vers le rivage par de violentes tempêtes dans le Pacifique avec des vents soufflant jusqu’à 160 km/h (100 m/h). Il y a peu d’endroits sur Terre où les rivages sont aussi hostiles à l’homme et à la nature. Sous l’effet combiné des vagues et du vent, d’énormes rochers et des troncs d’arbres sont projetés sur les hautes falaises et dans les forêts d’épinettes, qui ont étonnamment tenu bon pendant des siècles de ce bombardement.
Il y a environ vingt millions d’années, ce morceau de roche volcanique de 5 953 kilomètres (3 700 milles) carrés s’est détaché du continent nord-américain et a dérivé pendant des millénaires jusqu’au bord du plateau continental du Pacifique. Il s’y trouve toujours aujourd’hui, reposant dangereusement le long des plaques convergentes du Pacifique et de l’Amérique du Nord. Les îles sont situées directement sur l’une des failles les plus actives au niveau sismique de la planète. Cette faille est affectueusement surnommée « la Charlotte ». Elle est à l’origine de puissants tremblements de terre tous les trente ans environ.
La dernière des quelque vingt glaciations du Pléistocène a commencé à se retirer de l’archipel vers 16 000 avant notre ère, soit environ deux mille ans plus tôt que le reste des masses glaciaires d’Amérique du Nord. Ce retrait s’est terminé il y a environ treize mille ans, au moment où les premiers humains ont fait leur apparition sur les îles. En raison de sa couverture particulière de glace, Haida Gwaii est considéré par les historiens de la nature comme un « refuge partiel », un refuge pour les espèces végétales et animales qui existaient avant l’ère glaciaire et qui y ont survécu. On parle d’au moins trente-neuf espèces, y compris des sous-espèces rares ou distinctives de la petite nyctale, du pic chevelu, du geai de Steller, ainsi que la sous-espèce pealei du faucon pèlerin. Il y a aussi des espèces de mammifères qui sont uniques et spécifiques d’une façon ou d’une autre à Haida Gwaii. On y retrouve des sous-espèces de martre des pins, de loutre de rivière, d’hermine haïda, de musaraigne sombre, de chauves-souris argentée, de chauves-souris de Keen, de petite chauves-souris brune, de souris sylvestre, et d’Ursus americanus carlottae, le plus grand ours noir au monde. Toutes ces espèces ont développé des particularités si différentes de leurs homologues du continent qu’elles sont désormais considérées par les biologistes de la faune comme endémiques à Haida Gwaii. Elles ne peuvent être observées que dans cet écosystème si varié et luxuriant que les biologistes ont surnommé ces îles « les Galápagos du Nord ». À ces espèces s’ajoute une longue liste de plantes étranges et de mousses iridescentes que l’on ne trouve que sur l’archipel, créant ainsi un environnement vraiment extraordinaire. Ces lieux sont si envoûtants et si bizarres, au plan sonore et visuel, qu’ils auraient pu servir de décor pour le film Avatar.
Malheureusement, plusieurs plantes et animaux sont au bord de l’extinction, en raison d’un siècle de coupe d’arbres intensive menée sur les îles par le gouvernement de la Colombie-Britannique, de l’introduction d’espèces animales comme le cerf de Sitka, du raton laveur, et de l’arrivée de rats bruns sur les bateaux. La chasse et le piégeage ont également causé beaucoup de tort. Le caribou de Dawson (Rangifer tarandus dawsoni) a disparu il y a longtemps. On ne le retrouvait autrefois uniquement qu’à Haida Gwaii et il constituait une source vitale de protéines pour son seul prédateur, l’homme. Le même sort attendait la loutre de mer, dont les peaux étaient jadis un symbole de prestige des souverains du monde entier. Les loutres font maintenant un lent retour en ces lieux et il est question d’introduire un petit caribou génétiquement similaire à celui de Dawson. Mais il y a quatre-vingts autres plantes et animaux locaux qui sont officiellement classés comme étant des « espèces menacées ».
Il est aujourd’hui très difficile d’imaginer ces lieux totalement dépourvus d’arbre, tant il est difficile de se promener à Haida Gwaii, de s’y frayer un chemin dans l’une des forêts tropicales les plus denses du monde. Ces îles constituent un écosystème qui, au niveau de la masse, supporte plus de biomasse que tout autre écosystème sur la planète. Et il en était ainsi lorsque les premiers habitants s’y sont installés et y ont vécu en symbiose pendant quatre ou cinq mille ans avec les conifères des forêts vierges, comme l’énorme épinette de Sitka et le cèdre rouge. Les Haïdas considèrent pratiquement aujourd’hui ces arbres comme des parents. « Un dieu indulgent n’aurait pu rien offrir de mieux », a déclaré Bill Reid, maître sculpteur et fabricant de canoës haïda, au sujet du cèdre, son matériau de prédilection et la source botanique de sa culture.
Le détroit d’Hécate sépare les îles du continent. C’est une étendue d’eau peu profonde d’une largeur moyenne de 80 kilomètres (50 milles). Nommé en l’honneur de la déesse grecque de la sorcellerie et de la magie, et rebaptisé « la chienne noire » par les marins locaux, ce détroit est l’une des étendues d’eau les plus dangereuses de la planète. Les eaux peu profondes, les courants forts et les vents violents peuvent transformer un calme plat en vagues tumultueuses de six mètres (vingt pieds) de haut en quelques minutes. De nombreuses épaves reposent en son fond.
Avant l’ère glaciaire, une partie du détroit était à découvert, laissant place à une vaste plaine herbeuse qui s’étendait sur au moins la moitié de sa longueur. Il est même probable que les îles aient été brièvement accessibles à pied depuis le continent, à un moment donné. C’est un tel pont terrestre qui pourrait expliquer la présence d’ours noirs et d’autres espèces continentales qui n’auraient pas pu évoluer sur les îles ou les atteindre à la nage. Des robots sous-marins ont également trouvé dans de petites vallées de la plaine submergée des preuves convaincantes de la présence de barrages à poissons construits par l’homme il y a 13 700 ans.
Le courant chaud du Japon tourbillonne vers le nord depuis l’équateur et transforme un climat qui devrait être plutôt inhospitalier en un climat semblable à celui de l’Écosse. Il abrite l’un des écosystèmes marins les plus diversifiés au monde. La remontée constante de ces courants riches en nutriments soutient l’une des zones de pêche sauvage les plus productives au monde. Cette réserve alimentaire précieuse profite non seulement aux humains vivant sur les îles, mais aussi aux saumons carnivores, aux vastes groupes de phoques et de lions de mer, aux plus de trente espèces de baleines, ainsi qu’aux dauphins, marsouins et millions d’oiseaux piscivores. La diversité de la vie intertidale autour des îles attire des biologistes marins de toutes les universités du monde. Et nous ne parlons là que du littoral.
À l’intérieur des terres, il y a plus d’espèces endémiques et isolées que partout ailleurs sur la planète… et certainement plus qu’aux Galápagos. Les ornithologues de passage pourront y voir un quart de million de couples nicheurs d’oiseaux marins et la plus grande concentration au monde de la sous-espèce pealei du faucon pèlerin. Les cygnes trompettes et les grues du Canada y séjournent en compagnie des macareux huppés, des stariques de Cassin, des guillemots à cou blanc et des Océanites cul-blanc. Ce sont toutes potentiellement des proies de la plus grande concentration de pygargues à tête blanche de la côte ouest.
La situation géographique a depuis toujours été un facteur important dans toutes les luttes de souveraineté humaine, et une étendue de terre entourée d’eau de tous côtés constitue un atout considérable pour les peuples qui en revendiquent la propriété. La frontière ne peut être plus évidente. Elle est incontestable. Avant sa « découverte » ou sa « conquête », il est peu probable qu’une communauté de personnes y ait vécu. La géographie a été l’un des grands atouts des Haïdas dans leur lutte pour l’indépendance : leur terre leur a toujours appartenu. Leur revendication leur semble donc évidente.
Extrait de « La leçon de Haida Gwaii : Un guide stratégique pour la souveraineté autochtone » (The Haida Gwaii Lesson : A Strategic Playbook for Indigenous Sovereignty), avec l’aimable autorisation de Inkshares
Environment
How the Sahtuto’ine Dene of Délı̨nę created the Tsá Tué Biosphere Reserve, the world’s first such UNESCO site managed by an Indigenous community
People & Culture
Comment une langue autochtone gravement menacée peut être sauvée
History
Une rétrospective des débuts de l’institution fondée il y a 350 ans, qui revendiquait autrefois une part importante du globe
People & Culture
La langue des signes des Autochtones des Plaines a été utilisée pendant de nombreuses générations pour permettre aux peuples autochtones de communiquer entre eux malgré les idiomes et la distance qui les séparaient. Le temps est venu de se la réapproprier.