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Profile de courage : La Garde côtière canadienne, qui a sauvé deux pêcheurs en détresse durant une tempête hivernale

Le capitaine en second Leslie Palmer, de la Garde côtière canadienne, a reçu une décoration canadienne pour acte de bravoure après avoir bravé une tempête hivernale pour sauver deux pêcheurs coincés sur la rive du chenal Grenville, près de Prince Rupert, en Colombie-Britannique, le 27 décembre 2004.

  • Published Jul 22, 2022
  • Updated Aug 09
  • 1,146 words
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Le front d’eau rocheux de Prince Rupert, en Colombie-Britannique, sous un ciel menaçant. Ici, les conditions météorologiques peuvent changer rapidement, et le 27 décembre 2004, le capitaine en second Leslie Palmer, de la Garde côtière canadienne, a été appelé à agir quand deux pêcheurs se sont retrouvés en situation de détresse en raison d’une puissante tempête hivernale. (Photo : Jayne Hamilton/Club photo Can Geo)
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La toute première décoration canadienne pour acte de bravoure a été remise le 20 juillet 1972. Pour souligner le 50e anniversaire de la remise de cette décoration, Canadian Geographic s’est entretenu avec cinq personnes ayant été décorées pour une action d’altruisme exceptionnelle. Cette série d’entretiens s’inscrit dans le cadre de Commémoration Canada, programme de Patrimoine Canada, qui vise à souligner d’importantes dates anniversaires au Canada. C’est donc l’occasion pour Canadian Geographic de revenir sur ces moments de l’histoire avec un regard parfois enthousiaste, parfois critique.

Le capitaine en second Leslie Arthur Palmer, C.V., a reçu la Croix de la vaillance le 13 octobre 2016, de Son Excellence la très honorable Michaëlle Jean, gouverneure générale du Canada, au cours de la cérémonie de remise de décorations pour actes de bravoure. Photo : Sgt Eric Jolin, Rideau Hall / GG2006-0297-001.
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La situation était grave. C’était la nuit du 27 décembre 2004, et le capitaine en second Leslie Palmer et son équipage naviguaient sur le Point Henry, garde-côte de la Garde côtière canadienne, au cœur d’une épaisse tempête de neige et sur une mer houleuse, pour se rendre à un point situé au sud de Prince Rupert, en Colombie-Britannique. Quelques heures plus tôt, la Garde côtière avait reçu un appel de détresse de cet endroit, et l’équipage d’un cargo étant passé par là plus tôt avait rapporté avoir vu une lumière sur la plage. Les conditions météorologiques étaient tellement mauvaises que Leslie Palmer n’était même pas en mesure de savoir où se situait la côte. 

En utilisant des caméras de vision nocturne, il a détecté le scintillement d’une lumière sur la plage. Quelqu’un agitait une lampe de poche dans la noirceur de la tempête. Quelqu’un était en détresse.

L’équipage devait trouver un moyen d’atteindre la plage. Ils ont alors navigué vers le sud le long du rivage sur une distance d’environ 2,5 kilomètres avant d’emprunter un petit chenal à partir duquel ils pourraient plus facilement lancer une petite embarcation de sauvetage. Freiné par les vagues qui s’abattaient sur la plage et les rafales qui atteignaient à 100 nœuds, Leslie Palmer a touché terre à environ un demi-kilomètre des pêcheurs en détresse. Sans se laisser décourager par les embruns soutenus qui glaçaient l’extérieur de sa combinaison, il a sorti du bateau un sac à dos contenant du matériel de sauvetage et a commencé à marcher, seul, vers la source de la lumière. « Comme l’équipage du navire était nouveau à l’époque, j’ai pris la décision, en tant que capitaine en second, de faire le chemin seul le long du rivage. » 

La visibilité était nulle et les vents étaient si forts qu’ils ont soulevé Leslie Palmer de terre à quelques reprises. Le long du rivage, une couche de neige d’environ un mètre rendait la marche difficile; il a donc décidé de marcher plus à l’intérieur des terres. Toutefois, quand il s’est rendu compte que le vent brisait les branches des arbres au-dessus de lui, il est vite revenu sur la plage. À un certain moment, il a marqué une pause, adossé à une souche, pour rassembler ses idées. « Je sentais mon cœur battre très fort et j’avais les yeux fermés », a-t-il dit. Puis, ses paupières se sont figées à cause du froid. « Je me suis alors dit : ‘Oh mon Dieu! Est-ce que j’ai dépassé mes limites? Est-ce que je fais la bonne chose?’ Toutes ces pensées vous envahissent. » Il a toutefois essuyé la glace de ses yeux avant de se remettre en route. « On se dépasse, parce qu’on se dit que si on se retrouve dans cette fâcheuse position, c’est parce que quelqu’un est en plus mauvaise posture que soi au bout du chemin. »

Le capitaine en second Leslie Palmer, de la Garde côtière canadienne. (Photo avec l’aimable autorisation de Leslie Palmer)
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Deux pêcheurs sont restés coincés sur une plage après que ce navire ait chaviré durant une tempête le 27 décembre 2004. Le capitaine en second Leslie Palmer et son équipage leur ont sauvé la vie. (Photo avec l’aimable autorisation de Leslie Palmer)
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Après environ 20 minutes, il a franchi une petite colline. De là, il pouvait apercevoir le faisceau d’une lampe de poche et entendre un homme qui criait au cœur de la tempête. L’homme l’a dirigé vers un radeau de sauvetage couvert qui avait été poussé sur la plage par la tempête et qui gisait contre un arbre déraciné. Le radeau était empli d’eau et de glace et un second homme se trouvait à l’intérieur, à moitié submergé, inconscient et certainement en train de mourir d’hypothermie. 

L’homme, capitaine du bateau de pêche qui avait chaviré, portait une combinaison d’immersion – un vêtement de survie pour tout le corps, destiné à garder le porteur au chaud et en vie – mais celle-ci s’était remplie d’eau glacée. Leslie Palmer et l’autre homme ont donc découpé la combinaison pour en extraire le capitaine et lui enfiler une autre combinaison apportée par le secouriste. « Dans ces conditions, il était extrêmement difficile d’extraire l’homme de sa combinaison et de lui enfiler une combinaison sèche. À ce point, j’étais plutôt fatigué », s’est souvenu Leslie Palmer. Il a ensuite inséré des pochettes chauffantes dans la combinaison pour garder le capitaine au chaud. « Il est un peu revenu à lui. Mais il ne faisait que marmonner. Il était incohérent. »

Leslie Palmer a contacté le Point Henry par radio pour avertir l’équipage qu’il y avait deux survivants. Il a dit avoir besoin d’une autre combinaison d’immersion, de couvertures et de matériel contre l’hypothermie. L’équipe du Point Henry a donc placé le matériel requis dans un sac étanche et y a attaché un anneau de lumière avant de le lancer à l’eau en espérant qu’il flotte jusqu’au rivage, là où se trouvaient les hommes. Malheureusement, les vagues en avaient décidé autrement et Leslie Palmer a dû revenir sur ses pas le long du rivage pour aller récupérer le sac. « Je suis presque retourné à mon point de départ et j’ai pu récupérer le sac et retourner là où se trouvaient les survivants », a-t-il dit.

Croix de la vaillance (CV). Source : Sgt Johanie Maheu, Rideau Hall, OSGG / GG05-2017-0400-019.
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Les conditions météorologiques se sont améliorées à l’approche du matin. Tout comme l’état du capitaine, qui avait repris connaissance avec l’aide de Leslie Palmer. Un navire plus imposant de la Garde côtière est arrivé sur les lieux vers quatre heures du matin. Les feux plus puissants de ce grand navire étaient synonymes d’espoir pour Leslie Palmer, qui a assuré aux deux hommes qu’ils seraient bientôt secourus. « Je leur ai dit : ‘Nous allons pouvoir vous sortir de cette plage bientôt. Tenez bon.’ Je leur apportais un soutien moral. » Une fois que le vent est tombé et que les conditions sur le rivage se sont améliorées, les hommes ont été amenés à bord du navire de la Garde côtière.

Leslie Palmer peine à se considérer comme le héros solitaire de cette nuit. « J’imagine qu’ils m’ont choisi, car je suis celui qui est descendu sur la plage », a dit Leslie Palmer en parlant du comité de sélection. « Mais je n’étais pas tout seul. » L’équipage du Point Henry et le second navire de la Garde côtière ont aussi participé au sauvetage. « Pour ma part, j’admire toujours les survivants, a-t-il ajouté. Ce qu’ils ont fait pour résister aux conditions dans lesquelles ils ont été plongés est phénoménal. » Cependant, recevoir la Croix de la vaillance, qui reconnaît les actes de courage vraiment remarquables accomplis dans des circonstances extrêmement périlleuses, est d’une grande importance pour Leslie Palmer.

Un hommage peut-être encore plus grand lui a été rendu bien plus tard, lorsque le capitaine a baptisé sa fille Leslie, du nom de l’homme qui lui a sauvé la vie sur la plage. « C’était un grand honneur, a-t-il reconnu. J’ai été très honoré qu’il le fasse. »

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