Wildlife

Faune sans frontières

La détérioration des relations binationales et le démantèlement des agences scientifiques Américaines jettent une ombre d’incertitude sur les efforts de conservation transfrontaliers actuels

  • Published Mar 28, 2025
  • Updated Apr 17
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Caribous de la Porcupine dans l’Arctic National Wildlife Refuge, Alaska. (Photo : Peter Mather)
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Le Canada acueille certaines des migrations animales les plus extraordinaires de la planète. La plus connue est sans doute le frai des saumons adultes qui quittent le Pacifique et remontent une myriade de cours d’eau jusqu’à leur lieu de naissance, sur des distances qui peuvent dépasser 1 500 kilomètres. Les sternes arctiques effectuent également un voyage aller-retour hallucinant entre l’Arctique et l’Antarctique, parcourant plus de 40 000 kilomètres chaque année. Mais la plus emblématique de toutes est sans doute les millions de papillons monarques qui se rassemblent chaque hiver dans les montagnes du centre du Mexique, peignant les sapins d’un noir et d’un orange surnaturels au terme d’une épopée de huit mois, traversant le continent sur quelque 4 500 kilomètres, au cours de laquelle naissent et meurent cinq générations.

Un loup gris dans le parc national Kootenay, en Colombie-Britannique, dans le corridor Y2Y. (Photo : John Marriott)
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Il n’est donc pas surprenant que le monarque soit l’emblème du Comité trilatéral Canada-Mexique-États-Unis sur la conservation et la gestion des espèces sauvages et des écosystèmes, un modèle de coopération continentale pour la conservation d’un ensemble commun d’écosystèmes, d’habitats et d’espèces. À l’instar d’autres initiatives de conservation sur le continent, l’accord s’inscrit dans un esprit de solidarité entre pays voisins. Un ensemble souvent complexe de compétences, d’agences, de nations autochtones, d’ONG et de groupes d’intérêt nationaux et internationaux travaillent ensemble pour le bien de tous ceux qui occupent ces territoires. Bien que le voyage spectaculaire du monarque reflète un cycle ancestral, il est de plus en plus perturbé par le développement, la perte d’habitat et la pollution. C’est pourquoi le monarque figure maintenant sur la liste des espèces en voie de disparition. Et maintenant, un autre vent contraire entre en jeu : la politique. Les actions malveillantes de l’administration américaine actuelle ont ouvert un trou béant au cœur du corridor migratoire du monarque, compromettant non seulement l’avenir du papillon, mais aussi la conservation et la gestion collective des écosystèmes et d’une myriade d’espèces, des oiseaux aquatiques aux carcajous en passant par les baleines.

Alors que les droits de douane injustifiés menaçant le bien-être de tous les Nord-Américains dominaient l’actualité, Trump 2.0 s’en prenait simultanément aux institutions internationales œuvrant dans les domaines de la santé, de la science et de l’environnement. Il a notamment remplacé des directeurs par des personnes manifestement non qualifiées, procédé à une politisation idéologique manifeste d’institutions autrefois non partisanes (soutenue par la désinformation émanant directement du Bureau ovale – les souris transgéniques, par exemple), annoncé des licenciements massifs et arbitraires, imposé des restrictions orwelliennes sur la recherche et la communication qui font passer la censure des scientifiques du gouvernement par Stephen Harper pour un simple jeu d’enfant, et imposé des coupes budgétaires et des gels de subventions impliquant des centaines de millions de dollars qui touchent de manière disproportionnée les étudiants des cycles supérieurs et les chercheurs en début de carrière – littéralement toute une génération de scientifiques américains. Ces actions ont eu un effet immédiat sur tout, de la recherche biomédicale de pointe au travail vital en matière de développement international et de vigilance environnementale, du financement essentiel de la science et de l’éducation à la gestion des terres et des parcs, et des données atmosphériques, océaniques et météorologiques essentielles à l’aide humanitaire en cas de catastrophe naturelle. Après l’éviscération de la principale agence climatique américaine, la National Oceanic and Atmospheric Administration, l’ancien scientifique en chef Craig McLean regrette le fait que la science américaine risque désormais de devenir une « entreprise clandestine ».

 La vénérable revue britannique Nature a élargi son propos avec le titre « Une attaque contre la science n’importe où est une attaque contre la science partout ». « Les singeries inutiles et bizarres du président sapent de nombreuses façons les relations avec le Canada, ce qui nuit également aux espèces partagées entre nos nations – ou aux terres, à l’air et à l’eau qu’elles occupent », explique Brett Hartl, directeur des affaires gouvernementales au Center for Biological Diversity à Washington, D.C. « Nous essayons toujours de déterminer quelles régions subiront les pires répercussions. Notre plus grande question est la suivante : jusqu’où les choses vont-elles se détériorer? »

Les orignaux sont communs dans le corridor A2A. (Photo : Oh Me Nerves Photography | Shaun Antle)
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Les inquiétudes de M. Hartl ne concernent pas seulement certaines espèces, mais aussi les relations humaines et les organismes qui se consacrent à leur préservation. L’Algonquin to Adirondacks Collaborative (A2A) est un partenariat entre les États-Unis, le Canada et les Premières Nations, qui collabore avec des scientifiques, des décideurs politiques et des groupes voués à la conservation afin de maintenir la connectivité génétique et des écosystèmes dans une région riche en biodiversité de forêts feuillues et de forêts mixtes couvrant l’est de l’Ontario et le nord de l’État de New York. Le site Internet de l’organisation indique que cette forêt, qui abrite une faune migratrice et endémique, est l’un des derniers liens intacts à grande échelle entre forêts et zones humides dans l’est de l’Amérique du Nord et qu’elle possède le meilleur potentiel pour le déplacement de la faune à travers le système des Grands Lacs et du Saint-Laurent.

Jess Lax, directrice générale d’A2A, partage l’opinion de M. Hartl : « Le partage de l’information est touché lorsque les relations sont perturbées », dit-elle à propos des obstacles liés à la prochaine réunion biennale qui doit se tenir aux États-Unis, mais pour laquelle les fonds – et la motivation – font maintenant défaut. « Si les Canadiens ne veulent pas ou ne peuvent pas participer, nous verrons que les relations ne seront pas aussi fortes. »

« Une attaque contre la science n’importe où est une attaque contre la science partout. » 

Il s’agit d’une considération essentielle lorsque la collecte d’informations est en jeu. Un aspect important du travail d’A2A est la cartographie des habitats et de la connectivité, qui permet de déterminer les terres à protéger afin de maximiser les avantages pour les espèces sédentaires, comme les champignons et les tortues, et de soutenir les espèces plus grandes et mobiles, dont les déplacements sur de longues distances sont essentiels pour le flux génétique. Des fonds provenaient du Canada pour couvrir les travaux au nord de la frontière et du Service national des parcs pour couvrir ceux au sud, mais ces derniers n’ont été que partiellement achevés avant que les fonds ne soient coupés. Si aucun autre financement ne peut être trouvé, cela pourrait nous laisser avec une vision fragmentaire du contexte pour la suite. « Voilà qui met un gros bâton dans nos roues, en plus de créer de l’incertitude », affirme Mme Lax. « Nous avons travaillé sur ce projet pendant 18 mois et nous espérions le terminer à l’automne 2025. Mais cela semble impossible maintenant. »

Carte : Chris Brackley/Can Geo
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La protection planifiée des habitats devenant un processus beaucoup plus long, les organismes comme A2A sont forcés d’adopter une position plus prudente; les perspectives changent sur ce qui est possible dans l’instant, et la vigilance est de mise quant aux répercussions à long terme qui ne peuvent pas encore être mesurées. L’une des conséquences probables touche l’écologie routière et les passages fauniques, pour lesquels les États-Unis disposaient généralement de plus de financement que le Canada. Lorsque les agences américaines se préparaient à faire quelque chose d’important sur ce front, note Mme Lax, cela créait un élan sur lequel toutes les parties pouvaient s’appuyer. « Maintenant que ces fonds ont probablement disparu, de même qu’une partie des ressources, leur attention doit désormais être concentrée ailleurs », dit-elle. C’est regrettable pour les animaux migrateurs comme Alice l’orignal, la mascotte emblématique d’A2A. Munie d’un collier émetteur dans le parc Adirondack de l’État de New York en 1998, Alice a parcouru quelque 570 kilomètres jusqu’au parc provincial Algonquin de l’Ontario, traversant ainsi une frontière, le fleuve Saint-Laurent et l’autoroute 401. « Il est déjà difficile de déterminer quelles espèces profitent le plus des passages fauniques, et cela ne fait que compliquer les choses », déplore Mme Lax.

Il existe de nombreuses espèces d’oiseaux dans le corridor A2A, notamment le chardonneret jaune. (Photo : Oh Me Nerves Photography | Shaun Antle)
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Jeunes hiboux grands ducs dans le corridor A2A. (Photo : Oh Me Nerves Photography | Shaun Antle)
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S’ÉTENDANT sur cinq États américains, quatre provinces et territoires canadiens et quelque 75 territoires autochtones le long de la partie nord de la colonne vertébrale des montagnes Rocheuses, les 1,3 million de kilomètres carrés visés par l’initiative de conservation Yellowstone to Yukon (Y2Y) forment la région sauvage montagneuse la plus intacte au monde. Depuis 1993, Y2Y a travaillé avec des centaines de partenaires sur l’« idée audacieuse » de protéger des zones sauvages interconnectées et riches en biodiversité pour permettre le déplacement libre des grizzlis et des ours noirs, des loups et des cougars, des caribous et des orignaux, des mouflons et des chèvres de montagne. L’organisme vise aussi à protéger de plus petits animaux sauvages ainsi que les écosystèmes de basse et de haute altitude qui les abritent. Sachant que la conservation d’une région aussi vaste et vitale est le meilleur moyen de lutter contre la perte de biodiversité et le changement climatique, Y2Y répond aux besoins essentiels non seulement de la faune de la région, mais aussi de ses habitants.

Dans ce corridor se trouve le spectaculaire Parc international de la paix Waterton-Glacier, né en 1932 de l’union du parc national des Lacs-Waterton en Alberta et du Glacier National Park au Montana, constituant un pilier à la fois emblématique et opérationnel de Y2Y. Avec ses pics glaciaires, ses canyons, sa forêt boréale, ses prairies, ses lacs glaciaires profonds et ses rivières qui se jettent dans trois océans distincts, la variété des écorégions du versant est va de pair avec la diversité de la faune, qui comprend la mégafaune citée plus haut, une litanie d’oiseaux et un célèbre troupeau de wapitis qui migre chaque année entre l’habitat alpin de Glacier en été et les prairies de Waterton en hiver. Ces caractéristiques en font une destination populaire pour les Américains et les Canadiens. Mais comme la conservation repose largement sur l’énergie humaine, la réduction des effectifs d’un côté du parc touchera non seulement sa capacité à servir le public, mais aussi les espèces qu’il est censé protéger.

Les papillons monarques sont couramment observés dans le corridor A2A pendant leur migration. (Photo : Oh Me Nerves Photography | Shaun Antle)
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« Il y a dix ans, lors d’une grande réunion internationale sur la conservation transfrontalière, quelqu’un a évoqué la différence entre la paix négative – l’absence de conflit – et la paix positive – l’action de travailler ensemble pour résoudre des défis communs et saisir des occasions », se souvient Jodi Hilty, présidente et scientifique en chef de Yellowstone to Yukon. « C’est vraiment pertinent aujourd’hui, car la conservation transfrontalière, qui est une question de valeurs et d’efforts partagés, est plus significative que jamais. Quelque chose que nous avons toujours tenu pour acquis dans la région Y2Y revêt maintenant une nouvelle importance. » 

Les efforts de conservation transfrontaliers peuvent également s’avérer d’une complexité redoutable. L’Accord international sur les caribous de la Porcupine entre le Canada et les États-Unis est un traité ayant force d’obligation conclu en 1987 pour coordonner la préservation de la grande harde transnationale de caribous de la Porcupine qui migre chaque année entre l’Alaska, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest. L’aire de répartition de la harde, qui s’étend sur plus de 250 000 kilomètres carrés, comprend 12 zones relevant de la compétence de cinq agences différentes (Service canadien de la faune, U.S. Fish and Wildlife Service et les services gouvernementaux de l’Alaska, du Yukon et des Territoires du Nord-Ouest chargés de la pêche et de la chasse). Ainsi, la gestion de la harde, assurée à la fois par un conseil d’administration multinational et un comité technique, implique deux gouvernements fédéraux, trois gouvernements d’État, territoriaux et provinciaux, huit accords de revendications territoriales des Autochtones, six réserves et parcs nationaux et territoriaux, et deux zones de gestion de la vie sauvage. Ce modèle de gestion coopérative a également été couronné de succès.

La gestion de la harde repose essentiellement sur des recensements aériens. Bien qu’en 2017, le nombre d’animaux était estimé à plus de 200 000, soit le chiffre le plus élevé depuis les années 1970, les récentes tentatives de recensement ont été entravées par des problèmes à la fois écologiques (harde dispersée) et environnementaux (chaleur et fumée des incendies de forêt).

Parc territorial Tombstone du Yukon dans le corridor Y2Y. (Photo : Sonny Parker)
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Malheureusement, la harde de caribous de la Porcupine est devenue un enjeu politique entre les républicains, les démocrates et les Autochtones de l’Alaska, puisqu’elle traverse l’Arctic National Wildlife Refuge, qui fait l’objet d’une controverse permanente. Mark Hebblewhite, chercheur canadien, ancien membre du conseil d’administration de Y2Y et professeur de biologie de la faune à l’université du Montana à Missoula, a côtoyé la harde. « Lors de la première administration Trump, je travaillais avec le Bureau of Land Management en Alaska lorsqu’on a autorisé le forage sur les terres qu’il administre », se souvient-il. « Parce que c’est l’un des gisements de pétrole et de gaz les plus dispendieux de la planète à exploiter, lors de la vente de baux, il n’y a eu que quatre offres. Il est probable que les menaces de forage réapparaissent, mais les considérations économiques liées à l’accès à cette ressource dans un marché libre pourraient les faire disparaître. Cela ne peut être que positif pour la harde qui, en raison de ses pérégrinations binationales, est particulièrement vulnérable aux changements à son habitat des deux côtés de la frontière.

En ce qui concerne la manière dont la gestion de la harde pourrait être touchée par les compressions budgétaires, M. Hebblewhite se réfère à l’un des principes favoris de l’écologie : la dépendance au contexte. « Cela dépend de beaucoup de choses », explique-t-il. « Par exemple, qui a été congédié? Cette personne participait-elle à la collecte de données? Si l’on ne dispose pas de données des Premières Nations et des Autochtones d’Alaska, il manque un élément clé de la gestion. Et l’obtention de ces données repose sur des relations de confiance mutuelle entre individus; une confiance qui s’acquiert lentement et qui se perd facilement si les acteurs ne sont plus présents. » Il souligne également la tâche colossale que représente le suivi de la harde. Une interruption des dépenses américaines pourrait signifier l’absence de recensement aérien pendant l’été. « Il est déjà difficile de compter les caribous, mais c’est encore plus difficile lorsque la moitié de l’équipe est absente et que personne ne peut émettre un chèque », déclare-t-il.

Les singeries inutiles et bizarres du président sapent les relations avec le Canada.

Les transferts d’argent transfrontaliers sont d’autant plus délicats qu’ils sont asymétriques. Les groupes canadiens voués à la conservation ont l’habitude d’avoir recours aux fonds américains pour améliorer le bilan relativement faible de notre pays en matière de gestion de l’environnement, une réalité alimentée par des lois de protection des espèces inefficaces, un financement insuffisant et une application minimale des lois sur les terres protégées, ce qui risque de créer davantage de lacunes. À titre d’exemple, M. Hebblewhite a dirigé une étude analysant l’expansion des zones protégées au sein du corridor Y2Y. Il a constaté que bien que 70 pour cent du budget provenait des États-Unis, les obstacles à l’acquisition de terres aux États-Unis faisaient en sorte que 70 pour cent des dépenses – et donc de l’expansion des zones protégées – se faisaient au Canada.

Bien que ce nouveau régime soit une mauvaise nouvelle pour Y2Y, Jodi Hilty pense que la motivation des deux côtés de la frontière peut aider à affronter la tempête. « Lorsque les États-Unis ont inscrit le carcajou sur la liste des espèces menacées l’année dernière, il était évident que l’espèce ne pourrait pas rester viable dans les 48 États contigus si elle n’était pas reliée à la population canadienne, et que le principal défi était de permettre aux animaux sauvages de traverser les routes en toute sécurité », explique-t-elle à propos d’une série de projets de passages fauniques approuvés ou en cours de réalisation dans les deux pays. « Le financement est peut-être incertain pour le moment, mais ces régions sont vraiment engagées et il est important de poursuivre les échanges pour soutenir ces efforts dans un contexte plus large. Avoir un projet qui dépasse les frontières favorise la mobilisation continue. »

Un grizzly dans le corridor Y2Y. (Photo : Sonny Parker)
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PENDANT CE TEMPS, les décrets qui ont éliminé les protections de la faune terrestre et de l’environnement touchent également la protection des milieux aquatiques transfrontaliers.

Essentiels des deux côtés de la frontière, les Grands Lacs représentent à la fois un lieu de vie et une source d’eau potable, de nourriture, de loisirs, de commerce et de transport pour quelque 30 millions de Nord-Américains. Ils forment le plus vaste et le plus diversifié des écosystèmes d’eau douce au monde. Depuis plus de sept décennies, la Commission des pêcheries des Grands Lacs, organisme binational, coordonne les efforts des agences gouvernementales canadiennes et américaines ainsi que des groupes voués à la conservation pour protéger les pêcheries commerciales et récréatives des lacs – évaluées à 5 milliards de dollars – contre la surexploitation, la pollution et les espèces envahissantes. Mais aujourd’hui, les coupures de personnel touchant son programme de longue date de lutte contre la lamproie marine envahissante – un parasite commun des poissons prédateurs tels que le touladi et le grand corégone qui, à lui seul, a presque détruit la pêche dans les Grands Lacs dans les années 1950 – mettent en péril l’ensemble de ce vaste trésor du centre du continent.

Les carcajous sont une autre espèce présente dans le parc territorial Tombstone au Yukon. (Photo : Sonny Parker)
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Et à l’est, avec moins de 380 spécimens restants, les baleines noires de l’Atlantique Nord, déjà menacées par les collisions avec les navires et l’enchevêtrement, doivent désormais affronter un nouveau péril : l’indifférence des autorités américaines. « Il s’agit d’une espèce, comme tout autre animal sauvage, qui ne connaît pas les frontières, de sorte que ce qui se passe aux États-Unis peut avoir des répercussions au Canada », a déclaré Kim Elmslie, directrice de campagne pour Oceana Canada, à la CBC. « L’assouplissement ou le démantèlement des mesures en vigueur aux États-Unis pourrait accélérer le déclin et l’extinction potentielle de cette espèce. »

Bien que l’opposition commence à s’organiser aux États-Unis, elle est entravée par le fait que de nombreux membres de la communauté scientifique sont réduits au silence par la menace de nouvelles pertes d’emplois. Une centaine de poursuites ont été intentées contre l’administration Trump par plusieurs acteurs, des groupes de défense des droits des travailleurs au Center for Biological Diversity de Hartl. Ils ont remporté quelques victoires initiales, mais le processus demeure d’une lenteur exaspérante dans une période critique. Heureusement, la fougue de la jeunesse fait contrepoids. Lancé par cinq scientifiques en début et en milieu de carrière, « Stand Up for Science » est rapidement devenu un mouvement national visant à défendre la discipline en tant que bien collectif et pilier central du progrès social. Le 7 mars, des manifestations officielles ont eu lieu dans 32 villes américaines et des déclarations de soutien ont été faites par des organismes internationaux, tels que l’organisme canadien Évidence pour la démocratie, qui considère de telles attaques comme étant étroitement liées à la politique interne de son propre pays.

Le caribou de la Porcupine migre à travers l’Alaska, le Yukon et les Territoires du Nord-Ouest. (Photo : Ron Erwin)
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Les enjeux environnementaux s’appliquent également aux êtres humains, et de nombreuses personnes s’efforcent de veiller à ce que la pollution de l’eau et de l’air générée dans un pays ne nuise pas à l’autre. « Essentiellement, je vois une perturbation générale de la capacité à coopérer sur tout défi environnemental », affirme Brett Hartl, fustigeant les répercussions fulgurantes des actions de M. Trump sur le savoir institutionnel, l’expertise et la capacité à aborder des problématiques complexes qui ont demandé des efforts colossaux pendant des décennies. « Détruire tous nos efforts d’une manière aléatoire et sans but rendra la reconstruction difficile. Les effets cumulatifs des attaques contre chaque agence seront, en fin de compte, beaucoup plus coûteux que l’argent économisé grâce à une action individuelle. »

Et pourtant, c’est ce même facteur humain et cette histoire de coopération qui pourraient finalement nous tirer d’affaire. Un seul ennemi belliqueux peut menacer les monarques et d’autres espèces migratrices, les corridors fauniques binationaux et les voies navigables, mais il est peu probable que des gouvernements plus progressistes et des personnes passionnées par la protection de ces espèces et de l’environnement renoncent à trouver une trajectoire prometteuse. « Dans la mesure où les organisations non gouvernementales peuvent continuer à travailler de manière transfrontalière, déclare Jodi Hilty, ces efforts s’avéreront probablement les plus importants pour la santé à long terme des deux pays. »

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This story is from the May/June 2025 Issue

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