Travel
How to stop a gold rush
The new movement building flourishing tourism hubs across Canada – one sustainable example at a time
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Il se passait quelque chose d’étrange dans la petite ville de montagne de Rossland, en Colombie-Britannique. En 2020, alors que la pandémie se prolongeait, la Mecque de la nature en plein air était florissante, mais les touristes se faisaient rares. La communauté de West Kootenay, située sur la fameuse « route de la poudreuse » de la Colombie-Britannique, est connue pour ses randonnées pédestres, le vélo et le ski, mais alors que les visites touristiques déclinaient, l’immobilier était en plein essor. Et au lieu de fermer, de nouvelles entreprises ont ouvert leurs portes, notamment le bistro Rossberry Hill, dont le menu est composé d’ingrédients locaux, et l’auberge Wild Turkey, une maison patrimoniale de 1905 inspirée de la grande époque victorienne et qui a été minutieusement restaurée. En quelque sorte, Rossland vivait sa deuxième ruée vers l’or. La première – lorsque la découverte de riches gisements d’or a déclenché une course qui a fait de Rossland le premier centre minier d’Amérique du Nord – a atteint son apogée en 1897, la population de la ville grimpant alors à 7 000 habitants. En 1929, tout était fini. Les mines n’étant plus rentables et ayant été abandonnées, le nombre de résidents a chuté à seulement 2 100. Le boum s’est officiellement effondré, et de nombreuses entreprises ont fermé leurs portes.
L’actuelle mairesse de Rossland, Kathy Moore, ne peut s’empêcher de voir cette première ruée vers l’or comme un appel à la prudence. L’histoire pittoresque de la ville, son éloignement et sa beauté naturelle font de Rossland une destination attrayante.
Mme Moore sait à quel moment exactement elle a compris que seuls les habitants de la ville pouvaient sauver Rossland d’un deuxième cycle d’expansion suivi d’une récession. Ce moment est survenu en 2007, peu de temps après la vente à un groupe d’investissement privé de la très prisée station de ski Red Mountain, qui était dirigée par des bénévoles et que le peuple Sinixt appelle « kmarkn », ce qui peut être traduit par « sommet lisse ». En l’espace de quelques mois, le groupe a proposé de créer un terrain de golf dans les collines surplombant la ville, directement sur le bassin versant de la communauté. « Cela a attiré l’attention des gens », souligne la mairesse. On a dit à la communauté qu’il n’y aurait pas de risques pour l’environnement; cependant, un groupe de médecins locaux a rapidement exprimé des inquiétudes quant au danger potentiel que représentent les herbicides du terrain de golf qui s’infiltrent dans l’eau. « Nous avons réalisé que nous devions décider nous mêmes de ce que nous voulions », dit-elle.
La ville s’est réunie et a élaboré un plan communautaire officiel afin de définir la vision et les objectifs des citoyens en matière d’utilisation des terres, de conservation, de croissance, de logement, de transport et de loisirs. Une crainte est rapidement apparue chez les résidents de Rossland concernant le préjudice que pouvait causer à la ville un tourisme non contrôlé. « Cela peut sembler ridicule, mais pourquoi la croissance est-elle nécessaire? Nous avons conclu qu’il valait mieux avoir moins de visiteurs que de risquer d’altérer l’identité fondamentale de la ville », explique Mme Moore.
Plutôt que d’attirer les touristes, la ville a préféré se tourner vers ses habitants. « Nous avons travaillé à l’embellissement de l’avenue Columbia (la rue principale, qui date des années 1890 et rappelle le Far West) et mis en oeuvre un service Internet haute vitesse pour attirer les entrepreneurs nomades. » Les autorités ont également collaboré avec les propriétaires de Red Mountain afin que leurs plans de développement s’harmonisent avec ceux de la ville et soutiennent les entreprises locales et les objectifs communautaires. Résultat? Contrairement à ce qui se passe dans de nombreuses villes de ski, les maisons du nouveau projet Red Mountain Village n’ont pas été achetées par des investisseurs à la recherche d’une deuxième ou troisième propriété, mais par des personnes désireuses de devenir des résidents de Rossland à l’année.
Entre 2006 et 2021, les revenus hôteliers de Rossland ont plus que doublé et sa population est passée de 3 278 à 4 140 habitants. L’avenue Columbia est redevenue une artère dynamique, accueillant des festivals, des dizaines d’entreprises locales et un sentier pédestre patrimonial récemment aménagé. Les organisations bénévoles ont prospéré, alors que les habitants de la région dirigeaient la Rossland Heritage Commission, le Rossland Council for Arts and Culture et le Black Jack Ski Club – un parcours de ski de fond qui serpente à travers une forêt ancienne. L’organisme Friends of the Rossland Range a créé une signalisation pour les sentiers et reconstruit huit cabanes à usage diurne sur certains des sentiers de randonnée pédestre et cycliste les plus pittoresques de la région. En 2019, le Club Lions de Rossland a ouvert le sentier 100 Acre Wood Supprimer, qui traverse un bosquet d’arbres anciens dans une forêt appartenant à l’entreprise ATCO Wood Products.
« Il y a longtemps que j’ai entendu quelque chose de négatif sur le tourisme », déclare la mairesse Moore. Bien que cela n’ait pas été planifié, Rossland s’inscrit dans une tendance de voyage avant-gardiste, dont plusieurs destinations d’un bout à l’autre du pays ont pris conscience. Présenté comme un antidote au type de tourisme nuisible qui laisse les résidents méfiants et l’environnement appauvri, le tourisme régénérateur crée des expériences de voyage permettant aux employés, aux entreprises, aux collectivités et aux écosystèmes de s’épanouir durablement tout en améliorant la situation des résidents. Il s’agit d’une métamorphose de l’idée que l’on se fait traditionnellement du tourisme : au lieu de mesurer le succès en fonction du nombre de personnes qui séjournent à l’hôtel, cette nouvelle tendance considère le tourisme plus globalement.
L’expression « tourisme régénérateur » a été utilisée pour la première fois par Anna Pollock, qui travaille depuis 45 ans dans le secteur du tourisme. En 2010, elle a fondé Conscious Travel, une entreprise de sensibilisation et de conseil vouée à la création d’une meilleure forme de tourisme. Dans le cadre de ce modèle, le tourisme est un outil capable de créer des destinations communautaires florissantes tout en régénérant et en rétablissant les ressources détériorées. Au mieux, le tourisme régénérateur enrichit la communauté, crée de bons emplois, préserve la culture locale et joue un rôle dans le rééquilibrage et la protection de l’environnement. Cela peut se faire de plusieurs manières; l’un des principaux facteurs est l’attraction d’entreprises engagées à long terme à l’égard de la collectivité, faisant en sorte que l’argent y demeure et permettant à l’ensemble de la communauté d’accueil de profiter des emplois touristiques ainsi créés. Le modèle s’inspire du tourisme autochtone, qui est souvent régénérateur par nature et qui favorise la durabilité, la réconciliation et la valorisation culturelle. Pour que le tourisme régénérateur fonctionne, il faut avant tout attirer les bons clients.
« Pas seulement des gens qui dépenseront de l’argent, mais des visiteurs qui seront aussi respectueux à l’égard de la destination d’accueil », souligne Gracen Chungath, vice-présidente principale du Développement des destinations pour Destination Canada, la société d’État chargée de promouvoir le tourisme au Canada.
Lorsque Susan Cull a obtenu son diplôme d’études secondaires au début du siècle, cette habitante de l’île Fogo ne pensait pas avoir un avenir sur son île bien-aimée. Au début des années 1990, le moratoire sur la pêche à la morue avait anéanti l’industrie de la pêche de Terre-Neuve, qui est le moteur de l’île, et les communautés portuaires étaient à l’agonie. « Il y a eu un exode hors de l’île; le portrait était vraiment sombre », se souvient cette femme, qui est aujourd’hui vice-présidente des opérations de l’organisation Shorefast.
Puis, un coup de génie – une étincelle surgie des braises faiblissantes animant la population de l’île. Zita Cobb, millionnaire ayant fait fortune lors du boum technologique d’Ottawa, a imaginé une stratégie audacieuse pour redonner vie à son île natale, une stratégie qui verrait un phénix renaître de ses cendres riches et fertiles. Fondée en 2004 en partenariat avec ses frères, Anthony et Alan Cobb, la Shorefast Foundation utilise l’art et le tourisme pour mettre en valeur de façon magistrale 400 ans de culture axée sur la morue et tout le reste. Dans les côtes rocheuses de l’île Fogo, Mme Cobb a décelé de grandes possibilités de reconstruction communautaire.
« Elle posait des questions simples, souligne Susan Cull, basées sur le lieu même : Qu’avons-nous? Que savons-nous? Qu’est-ce qu’on aime? Qu’est-ce qui nous manque? »
Certaines des réponses, notamment les gens, notre culture et la géographie, ont fait apparaître le tourisme comme une évidence.
Le résultat de ce questionnement s’est matérialisé par l’ouverture de l’auberge Fogo Island, un établissement moderne de 29 chambres conçu par l’architecte terre-neuvien Todd Saunders, qui, avec ses fenêtres courant du sol au plafond, offre des vues sur la mer et le ciel. La totalité des excédents d’exploitation de l’auberge est réinvestie dans la communauté. Lorsque l’établissement a commencé à accueillir des clients, des entreprises dérivées ont vu le jour : restaurants, commerces de détail, artistes et fabricants. Zita Cobb a trouvé de l’or, mais elle ne souhaitait pas en exploiter les gisements en lançant la croissance sur un train fou, condamné à dérailler.
Le plan consistait plutôt à gérer soigneusement la croissance. À cette fin, un rôle central a été attribué à l’art au moyen de programmes de résidence artistique, de galeries et d’artistes qui s’implantent sur l’île alors qu’il y a dix ans, il n’y en avait pas. Les jeunes ont commencé à revenir et la population s’est stabilisée. « Il y avait de l’espoir. Mon mari et moi avons réalisé que nous pouvions élever notre famille à Fogo, comme j’en avais toujours rêvé, explique Mme Cull. »
Alors que la flamme de l’île Fogo se rallumait, l’idée selon laquelle le bon type de tourisme peut régénérer une communauté entière semblait soudainement réalisable – et il n’a pas fallu longtemps pour que d’autres destinations s’en rendent compte.
Shorefast a lancé le projet Community Economies Pilot, qui rassemble différents types de communautés pour qu’elles apprennent les unes des autres. Cinq de ces communautés ont depuis été recrutées par Shorefast pour se joindre à l’île Fogo afin de collaborer et de contribuer au projet pilote : South Vancouver Island en Colombie- Britannique, ainsi que Hamilton, London et Prince Edward County en Ontario. « Il n’y a pas deux endroits identiques; une île de Terre-Neuve n’a pas les mêmes besoins qu’une ville comme Hamilton ou Victoria. Mais nous avons constaté avec surprise la similitude des problèmes auxquels nous sommes confrontés. Nous avons des choses à apprendre les uns des autres, souligne Susan Cull. »
Victoria est une vieille routière du tourisme, mais la ville avait désespérément besoin d’un renouvellement de son image. Toutefois, avant que cette destination touristique mûre puisse commencer à réinventer son avenir, elle avait un problème majeur à résoudre.
« J’ai appris qu’avant d’arriver à un tourisme régénérateur, ou même à un tourisme durable, nous devions traiter la question de la saisonnalité », déclare Paul Nursey, PDG de Destination Greater Victoria. En tant que destination estivale, Victoria abritait de nombreuses entreprises touristiques qui avaient du mal à survivre en basse saison. Destination Greater Victoria a commencé à se concentrer sur le soutien aux entreprises en commercialisant la ville comme une destination quatre saisons.
C’est à ce moment-là que, selon Paul Nursey, l’innovation a commencé à prendre son essor en arrière-plan, avec la durabilité comme moteur.
« Nous avons Big Wheel Burger, une chaîne de burgers détenue localement, entièrement neutre en carbone et sans déchets. Le Fairmont Empress, notre hôtel emblématique, a investi dans son système de chaudière pour réduire son empreinte carbone. Nous avons des hôtels neutres en carbone, comme Laurel Point Inn. Harbour Air ouvre la voie aux avions électriques. L’entreprise d’observation de baleines Prince of Whales investit dans la recherche pour réduire le bruit des navires, explique M. Nursey. La durabilité fait partie de notre identité maintenant. »
Même la ville s’est mise de la partie, en s’engageant à réduire les émissions de la communauté de 80 % par rapport aux niveaux de 2007 d’ici 2050 et à passer à des sources d’énergie renouvelables à 100 %. En 2021, Destination Greater Victoria a obtenu la désignation de neutralité carbone octroyée par Offsetters, une société de premier plan de services consultatifs sur le climat. Destination Greater Victoria est ainsi devenue la première grande organisation de marketing de destination en Amérique du Nord à atteindre cet objectif.
Et si la durabilité de l’environnement n’est qu’un élément du tourisme régénérateur, elle peut en fait contribuer à soutenir les autres aspects de ce secteur. « Les employés attendent des entreprises pour lesquelles ils travaillent qu’elles fassent preuve de leadership en matière de durabilité », déclare Jill Doucette, fondatrice de Synergy Enterprises, organisation établie à Victoria qui aide les entreprises touristiques à atteindre la neutralité carbone. L’heureux résultat de ces efforts est un afflux de touristes désireux de visiter des destinations durables.
Après des années d’écoblanchiment, où tout a été qualifié d’écologique ou d’éthique, depuis les croisières jusqu’aux vacances de ski, les voyageurs veulent soutenir les entreprises qui sont en mesure de justifier leurs déclarations écologiques. « La confiance des consommateurs est un élément fragile, mentionne Mme Doucette. Nous sommes très attachés à la transparence. Nombre de nos clients publient désormais leur empreinte carbone. »
Victoria, comme de nombreuses destinations au Canada, travaille à l’obtention de la désignation de tourisme durable Biosphère accordée par l’Institut du Tourisme Responsable, basé en Espagne. Parrainée par l’UNESCO, le Programme des Nations unies pour l’environnement et l’Union européenne, cette désignation est conforme aux 17 objectifs de développement durable des Nations unies et à l’accord de Paris sur le changement climatique, adopté lors de la COP 21. La désignation est attribuée sur la base d’un ensemble complet de mesures de durabilité.
Pour trouver l’inspiration nécessaire au lancement d’une révolution durable, Victoria n’a pas besoin de chercher bien loin. La première organisation canadienne à obtenir la certification Biosphère était autrefois ce qu’un responsable local du tourisme a appelé « une destination de fête estivale attirant des gens qui voulaient s’enivrer et jeter des bouteilles de bière dans le lac ».
Thompson Okanagan est devenue aujourd’hui une destination qui envisage l’avenir sur une période de sept générations. Le processus de transformation a débuté au début des années 2010 par une stratégie touristique qui a pris en compte les forces, les faiblesses, les possibilités et les menaces caractérisant la région et qui a débouché sur un plan touristique décennal axé sur la durabilité.
Karen Chalmers, directrice générale de l’organisation Symphony Tourism Services de Kelowna, souligne que « le tourisme n’est pas durable s’il ne respecte pas et ne soutient pas les communautés dans lesquelles il se développe ». Pour cette raison, l’association touristique de la région a entamé son « important parcours de durabilité » par des mesures visant à établir des relations avec chacune des 33 communautés autochtones de Thompson Okanagan et à encourager les entreprises et les communautés à faire preuve de créativité dans leurs solutions de durabilité. Parmi les idées qui ont découlé de ces mesures, citons la création d’une « autoroute électrique » (avec accès facile à des bornes de recharge), des initiatives comme celles du vignoble Burrowing Owl Estate Winery, qui verse 100 % de ses frais de dégustation à la Burrowing Owl Conservation Society, et des partenariats comme ceux de la cidrerie Upside Cider, qui soutient les agriculteurs biologiques locaux en utilisant leurs fruits dans ses cidres.
L’association touristique a alors créé le « 7 Affirmations Pledge », un serment touristique destiné à « soutenir les personnes qui vivent dans la région de Thompson Okanagan et à enrichir l’expérience de ceux qui la visitent ». En faisant promettre aux visiteurs de découvrir l’âme d’un lieu à travers son histoire, d’acheter localement et d’agir en tant que gardiens de la terre, de l’air et de l’eau, la région de Thompson Okanagan attire un nouveau type de touristes.
« Le tourisme n’est pas durable s’il ne respecte pas et ne soutient pas les communautés dans lesquelles il se développe. »
Il n’y a pas si longtemps, des autobus touristiques venaient décharger leurs passagers auprès de la Première Nation de Wiikwemkoong, sur l’île Manitoulin, dans le nord de l’Ontario. « Nous ne les avons pas invités, et cela nous a paru invasif », explique Luke Wassegijig, responsable du tourisme à Wikwemikong Tourism.
La Première Nation, qui avait évité le tourisme en raison de ses racines coloniales, s’est retrouvée envahie par des visiteurs indésirables qui se promenaient dans des lieux sacrés sans y être invités. Elle a ainsi décidé qu’un engagement dans le tourisme pouvait être un bon moyen de sauvegarder sa culture. Elle a commencé par construire son propre centre d’information touristique afin de permettre à la communauté de contrôler ce qui est raconté aux visiteurs et de leur expliquer où ils peuvent et ne peuvent pas aller.
À partir de là, la communauté s’est concertée sur les types de visiteurs qu’elle souhaitait attirer. « Nous devions construire une infrastructure qui soit attrayante à la fois pour les résidents et le type de visiteurs que nous voulions », indique M. Wassegijig. Un mode de vie sain et actif était une priorité, et c’est ainsi que des sentiers de randonnée, un parc de conditionnement physique et des rampes de mise à l’eau ont rapidement suivi. Le joyau de cette couronne ést le parc de Point Grondine, d’une superficie de 7 200 hectares, le premier parc appartenant à des Autochtones au Canada à avoir été conçu par eux de A à Z. Tout en travaillant à ces projets d’infrastructure, la communauté a commencé à réfléchir à la phase suivante, ce qui a donné naissance à un programme d’orientation culturelle, dans lequel des guides de région sauvage, qui font découvrir la contrée aux visiteurs sur terre et sur l’eau, reçoivent une formation axée sur le plein air et la connaissance de la culture traditionnelle.
Les résultats ont transformé l’ensemble de la communauté. « Les guides se réapproprient notre culture et enseignent aux visiteurs le lien étroit qui nous unit à la terre. Les touristes se montrent véritablement intéressés : ils souhaitent prendre part à la réconciliation et connaître les traditions de notre terre, souligne Luke Wassegijig. »
Cette idée, selon laquelle les Premières Nations doivent rechercher des visiteurs désireux de découvrir la culture autochtone authentique, est aussi un élément essentiel de l’éthos qui existe à l’Hôtel-Musée Premières Nations de Wendake, un site de la Nation huronne-wendate au Québec. Le concept a commencé par le musée, que la Nation a conçu comme un lieu de préservation de ses connaissances, de son territoire et de ses souvenirs. Les touristes visitaient le musée, mais celui-ci ne leur montrait que le passé de la communauté. La Nation huronne-wendate souhaitait également faire place à la culture contemporaine.
C’est ainsi qu’est né l’Hôtel-Musée Premières Nations, un hôtel-boutique de 55 chambres comprenant un spa et un restaurant, qui a ouvert ses portes en 2009 afin de permettre aux visiteurs de découvrir l’hospitalité des Premières Nations dans cette région.
« Les gens se rappelaient ce qu’ils avaient vu dans les films ou les livres d’histoire, mais ils ne connaissaient pas le côté moderne de notre culture », indique Danisse Neashit, qui supervise le développement des ventes chez Tourisme Wendake. L’hôtel offre aux membres du personnel – qui proviennent de huit nations différentes du Québec – l’occasion de partager leurs cultures respectives avec les visiteurs.
L’établissement propose diverses activités culturelles, de la fabrication d’un bracelet en piquants de porc-épic à la visite de la maison longue, et exploite un restaurant dont le menu s’inspire des richesses de la terre. « Notre chef recrée certaines des saveurs de la gastronomie traditionnelle – une touche de feu de bois parfume les légumes et les gelées ont une saveur de fruits fraîchement cueillis », mentionne Mme Neashit.
Le plan fonctionne. Elle est d’avis qu’aujourd’hui, la possibilité de travailler pour l’hôtel, où des travaux d’expansion de 6,5 millions de dollars sont en cours afin d’ajouter 24 chambres, est un rêve devenu réalité. « Je suis très fière de ma culture, et je voulais la partager d’une manière authentique. De plus en plus de personnes en provenance du monde entier viennent ici pour découvrir la culture des Premières Nations. »
Bien que le tourisme ré-générateur soit récemment devenu une expression à la mode, le mouvement prend de l’ampleur depuis quelques décennies déjà.
L’impulsion vient de programmes tels que le Community Economies Pilot de l’organisme Shorefast et de conférences visant à sensibiliser les communautés à l’échelle du pays à propos de la meilleure façon d’exploiter leurs forces, d’entretenir des liens et de trouver des moyens durables de partager ce qu’elles aiment avec les visiteurs.
La clé de ces efforts a été d’inclure autant de voix communautaires que possible, souvent celles qui n’avaient pas été reconnues auparavant. Les communautés découvrent lorsqu’on crée quelque chose de spécial pour les habitants, les touristes veulent aussi profiter des avantages qui en découlent. Jusqu’à récemment, Richmond, en Colombie-Britannique, était mieux connue sans doute pour son Dumpling Trail, parcours semé de délicieux dumplings, pour son marché nocturne et pour l’aéroport de Vancouver. Mais Tourism Richmond, l’organisme de développement du tourisme de cette ville, a réalisé que la région était la Mecque secrète des ornithologues, qui affluaient dans les zones humides et sur le littoral pour observer des dizaines d’espèces d’oiseaux migrateurs, dont l’oie des neiges et le cygne trompette.
« Nous nous trouvons sur une importante voie de migration, mais seuls les ornithologues passionnés connaissaient la richesse de la région », explique Ceri Chong, directrice du développement des destinations et de l’industrie à Tourism Richmond. Cette prise de conscience a donné naissance au réseau BC Bird Trail. « Une fois qu’ont été mis en place les éléments de base – repérage des sentiers, création d’itinéraires, embauche de guides, élaboration de brochures d’information et d’un site Web –, les non-adeptes de l’observation d’oiseaux sont devenus débutants et la population a réalisé l’importance de ces zones pour l’environnement », déclare Mme Chong.
Après avoir arpenté les sentiers, les habitants et les touristes fréquentent les restaurants et les hôtels des environs et participent à d’autres activités locales.
À Montréal, par ailleurs, le mouvement des ruelles vertes a vu le jour en 1995. L’idée était de permettre aux habitants de transformer leurs ruelles en jardins, en aires de jeux ou en lieux de rassemblement pour lutter contre l’effet de serre urbain, améliorer la qualité de l’air, offrir un habitat aux oiseaux et accroître la biodiversité végétale. En 2019, on comptait 350 ruelles vertes, et à la fin de la première année de la pandémie, il y en avait plus de 450. Quelque part, les touristes ont découvert les jardins secrets et ont commencé à les explorer grâce à des randonnées à vélo organisées par Spade & Palacio ou à des visites à pied présentées dans le cadre de blogues, d’applications et de vidéos YouTube. Des concerts impromptus et d’autres événements locaux ont commencé à être organisés, et les ruelles sont devenues quelque chose de bien plus précieux que de simples espaces verts.
Le tourisme régénérateur consiste à protéger, à entretenir et à pérenniser ce que nous avons déjà, qu’il s’agisse d’une rue historique, d’un avant-port traditionnel, d’une forêt d’arbres anciens ou d’une culture qui prospère depuis des temps immémoriaux. Le processus est parfois complexe, mais finalement gratifiant. La réussite passe par la coopération au sein d’une communauté, rassemblant des personnes qui n’ont normalement pas leur mot à dire dans le domaine du tourisme, afin de créer une destination convenable pour tous.
This story is from the July/August 2022 Issue
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